Textes : Genèse 3, 9-15 ; II Cor 4,13 -5,1 ; Marc 3,20-35

1. Introduction

Voilà trois textes qui nous rendent attentifs et attentives à notre look, aux vêtements que l’on porte plus précisément et à notre demeure, notre habitat. Dans les premiers chapitres de la Genèse dont nous venons d’entendre un extrait de l’expulsion de l’homme et de la femme du jardin d’Eden, on peut comprendre que sans vêtement tout va pour le mieux mais qu’avec on prend conscience des risques de la connaissance du bien et du mal, lié dans ce récit à un lieu topologique, relatif au lieu où on habite. Autrement dit au contexte environnemental.
Dans le texte aux Corinthiens, 2ème épitre, Paul est clair, notre vie personnelle est comparée à une demeure et à un vêtement deux choses dont on ne saurait se passer aux quotidien. Montre-moi où tu habites et je te dirai qui tu es ? Qui se cache derrière ta cravate, ton foulard, ou autre look ? Qu’elle personnalité ?
Et dans le texte de l’évangile, Béelzéboul, donc Satan est en jeu. Du reste Béeluzéboul, justement signifierait littéralement : maître des demeures. Celui qui prend possession de l’environnement intime. Va s’immiscer dans les armoires aux garde-robe, aux penderies de complet-veston afin de tout faire non pas pour revêtir les locataires de ces logements, du St-Esprit, contre lequel, Béelzéboul est impuissant, ne peut rien, mais pour tenter de faire de ses locataires des demeurés, des aliénés au pouvoir de Satan.
À partir de cette constatation, je vous propose de faire un petit tour, autour de cette confession de Paul du texte : « J’ai cru, c’est pourquoi j’ai parlé nous croyons, nous aussi, et c’est pourquoi nous parlons. » Autrement dit, avec le même Souffle qui fait vivre notre foi, notre confiance en Dieu, selon les Écrits, nous constatons que Celui-ci habite notre demeure. Et parce que j’ai cru, je peux en parler, confesser ma foi. Sortir de ma demeure non contaminée pour témoigner.

2. Parler de quoi au juste

Mais parler de quoi au juste ? Et bien quant à moi, lorsque je crois, je parle de sainteté, au sens de mis à part. Être saint c’est être mis à part, canonisé dirait nos frères et sœurs catholique. L’état de sainteté c’est être séparé de… mis de côté, en dehors de, à part du monde qui grouille de toutes les tentations, les déviances du bon sens spirituel, qui abonde d’obstacles capable d’entraver notre témoignage. Être saint c’est en fait habiter un espace existentiel, ontologique – certes qui ne peut pas être permanent – habiter le plus souvent possible cet espace hors de Satan, du mal en fait. Et non pas être divisé car une division même si elle sépare en deux éléments par exemple ou plus, les éléments gardent leur substance. Les deux moitiés d’une pomme coupée en deux conservent le goût de la pomme. Une famille divisée par un bacille du mal quel qu’il soit ne peut subsister, mais ses membres gardent le même sang. C’est pourquoi ma demeure intérieure, éternelle selon l’apôtre Paul. Non faite par les hommes, invisible donc et qui dure toujours au nom de notre confiance en Dieu, n’a rien à voir, je crois, avec Béelzéboul. Car cette demeure éternelle donc qui dure toujours, est insaisissable dans sa totalité, son absolue. Et scientifiquement relative, toujours partielle aux investigations scientifiques, objectives physiques. En fait cette demeure éternelle selon l’apôtre ne peut jamais être définitivement saisie. Ni par toi, ni par moi, ni par vous toutes et tous aux capacités intellectuelles estimables et reconnues. Mais au cœur de la sainteté de Dieu, de sa manifestation au moyen de son St-Esprit, elle peut être ressentie, vécue en chacune comme en chacun. Un peu comme le seul élan de la gloire de Dieu. Comme une confession aimantée par son amour.
Quand je crois, je parle aussi de la grâce de Dieu, du don gratuit de son St-Esprit. Contre lequel je n’ai rien à dire sinon le recevoir et me laisser inspirer. Et finalement, quand, je crois, je parle de la beauté, morale et esthétique, artistique, au sens de l’acte créatif qui apriori n’est pas critique. « Dieu construit, le mal détruit ? questionne Michel Serres dans « La Légende des Anges ». L’un imagine, l’autre critique.

3. Je parle de sainteté
La sainteté d’abord un terme contesté, bourré de préjuger. En fait, un terme dont le monde ne veut plus tellement entendre parler. J’en parle personnellement parce que dans le texte de la Genèse que nous venons d’entendre, outre la tentative étiologique d’expliquer les causes du mal, avec une histoire d’homme, de serpent et de femme qui découvre sa nudité, je retiens le moment sacré, le moment et lieu mis à part, l’état de grâce qui précède ce narratif au sujet de couple humain et du serpent. Ce moment sacré ou lieu, qu’on appelle paradis, jardin d’Eden. En fait cet acte souverain du Dieu créateur qui laisse libre cours au souffle de vie, à son St-Esprit, à cette énergie transhistorique afin d’envisager un monde magnifique destiné à l’humain comme à toute la création, avant que tout ne bascule.

Et bien aujourd’hui comme hier, chaque foi que je ressens, que je prends conscience de ce souffle de Dieu, de cette énergie qui perdure à travers l’histoire comme dans les différentes manifestations et exercices de ma vie, je privilégie, entoure ces moments, plonge dans ceux-ci, fait rouler, si je puis dire en pensant à la pierre du tombeau vide, fait rouler hors de moi tout ce qui peut limiter, altérer ma connexion au souffle de Dieu. Et ceci, afin de m’ouvrir au jardin de la résurrection. À ce stade, je ne pense pas qu’il soit nécessaire de me pencher sur les forces du mal, celles de l’Enfer, mais bien plutôt de les laisser à leur néant, à leur vanité. Car nous avons avant tout besoin de nous concentrer, de dépenser notre énergie à la réception de l’œuvre de Dieu quand elle se manifeste. Surgit de son souffle créateur. Un souffle qui encore et toujours, aujourd’hui, est capable de donner la meilleur réponse à ce monde de fou, de cruauté dans lequel nous vivons.

4. Je parle de la grâce de Dieu
Je parle en plus de la grâce de Dieu en lien avec la gratuité du don de Dieu, en lien avec la demeure éternelle qu’Il nous accorde. Plus parce qu’elle est gratuite, car tout se paye avec le diable, que parce qu’elle est dans le ciel. La gratuité comme la grâce est sans porte-monnaie. Dieu n’attend pas vraiment un retour monnayable au don de sa grâce, mais une prise en considération des atouts, des privilèges, du charme, de la beauté, de l’élégance, de son souffle divin. Le St-Esprit n’est pas un combustible qui alimente un moteur du progrès et de la connaissance à outrance, c’est le don gratuit de la Vie de Dieu. Le contraire de ce consternant retour au primitif que nous connaissons et qui immobilise un peu partout les manifestations de la dite grâce de Dieu.

5. Je parle de la beauté
Et finalement parler de la beauté, si c’est d’abord un clin d’œil à l’histoire des grandes religions, c’est avant tout un pied de nez au diable, à Béelzéboul, aux oppositions, aux critiques négatives, à la loi du sang, manifestées contre Jésus. Alors qu’il accompli des miracles, vient de créer une équipe de choc, une task force pour annoncer l’arrivée du royaume de Dieu.
Je crois que la beauté est incontournable dans cet annonce du Royaume de Dieu. Comme ces moments de « demeure éternelle » chez Paul. « C’est ce que vous ne comprendrez pas qui est le plus beau. », nous rappelle un autre Paul, Paul Claudel. Et un encore ce célèbre auteur Dostoïevski, insistera pour affirmer que « La beauté sauvera le monde ». Et si vous me permettez un exemple personnel, la beauté spécifique au souffle de Dieu, dans cet enjeu, dans ce défi, est à l’image du style architectural roman. Il invite à la contemplation. Et la beauté devient tranquille, simple, protectrice, horizontale pourquoi pas, au contraire du style gothique qui peut transpercer, insister, être glacial, enflé quelque fois.
La beauté du message de l’évangile, de son annonce du Royaume de Dieu, à cette particularité qu’elle cherche plutôt à convaincre qu’à vaincre. Qu’elle nous invite à ne plus voir avec les yeux du monde, mais avec ceux du ciel ou encore à plonger notre regard dans la clarté de l’amour de Dieu si souvent déchiffrable autour de nous quand on le veut bien. Elle nous éclaire aussi avec cette lumière du foyer, de la demeure éternelle, comme le souligne l’apôtre Paul. Nous n’avons plus dès lors les mêmes yeux, quand l’icône de Jésus est devant nous, les mêmes mains qui peuvent être tenues par la main du Créateur. Nos pas sont plus sûrs, parmi les obstacles du mal. Jésus nous considère dès lors comme ses frères, ses sœurs, ma mère ajoute-t-il, si nous faisons la volonté de Dieu, le Père. Vous l’avez deviné, finalement la beauté c’est faire la volonté de Dieu avec le don de son St-Esprit. Autrement dit, chercher à sacraliser le monde, faire avancer le règne de Dieu afin de hâter, de précipiter la fin du règne de Béelzéboul. Amen.

 

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